La chronique historique « signée Donec » : Autopsie d’un crash

Le transport aérien est aujourd’hui extrêmement sûr. Il est même souvent nécessaire de donner un petit coup de missile pour que l’avion s’écrase. Nos amis russes ou iraniens maîtrisent parfaitement le sujet.

Il n’en était pas de même dans les années cinquante où les Dakota et autres SE161 Languedoc  n’hésitaient jamais à écrabouiller leurs passagers.

Ainsi le 3 mars 1952 le Languedoc d’Air France de la ligne Nice-Paris est venu terminer sa course (et celle de ses passagers) dans une orangeraie à deux pas de l’avenue Saint-Augustin non sans avoir rasé le palmier qui ornait la cour de mon immeuble niçois.

Le SNACASO Languedoc  était une de ces machines conçues à la veille de la guerre et passablement dépassées en 1946. Pourtant afin d’entretenir la capacité de production de notre industrie aéronautique une chaîne de montage fut relancée en 1945. Sa mise en service souffrit de maux récurrents dont la fragilité du train d’atterrissage n’était pas le moindre. Quand on connait la modernité du matériel américain de cette époque on se doute que le Languedoc était difficilement vendable. L’Etat l’imposa donc à des compagnies sur lesquelles il avait la main, à commencer par Air France qui le destina à des lignes intérieures. Mais son remplacement par des Douglas DC4 ne tarda pas.

Le 3 mars au matin notre Languedoc décolle de l’aéroport de Nice mais au lieu de poursuivre vers la baie des Anges, il vire sur les collines, survole le quartier de la Madeleine et va s’écraser dans l’orangeraie tout à côté des studios de la Victorine. Une explosion formidable retentit et immédiatement l’avion se transforme en brasier. Il est 9h05. Des 38 passagers et de l’équipage il n’y a qu’une seule survivante, atrocement brûlée, la danseuse classique Marguerite Delpy. Comble de malchance l’ambulance qui la transportait se renverse rue Notre Dame faisant deux autres blessés graves.
Il s’avéra après enquête que la cause du drame était un aileron défectueux.

Parmi les miraculés qui ont eu la bonne idée de rater l’avion, il y a le prestigieux général Corniglion-Molinier, compagnon de la libération et ci-devant député des Alpes-Maritimes. Il avait été refusé à l’embarquement faute de place.

La chronique historique « signée Donec » : La bataille de l’Authion

Il y a 75 ans, en avril 1945, avait lieu au sud des Alpes, dans le massif de l’Authion à quelques encâblures de Nice l’ultime affrontement de la guerre. L’affrontement débute le 10 avril 1945. Pourtant le Rhin avait été franchi le 24 mars et le 30 avril Hitler mettait fin à son aventure criminelle. Les carottes étaient cuites. Quel intérêt cette ultime bataille ces morts inutiles ? Qu’allait chercher le Général de Gaulle dans cette aventure sachant que les Alliés ne voulaient pas modifier les frontières alpines pour complaire au nouveau maître de l’Italie, le Maréchal Badoglio.

Outre Tende et la Brigue, je soupçonnais le général de s’intéresser avec insistance aux vallées piémontaises. N’a-t-il pas déclaré aux cadres de l’armée réunis à Beaulieu-sur Mer le 9 avril 1945:

Messieurs je suis au courant des sacrifices que je vous demande. La campagne qui s’ouvre sera pénible, je le sais. Elle vous ouvrira les portes du Piémont et vous conduira au Tyrol … Nous voulons reconquérir les frontières naturelles de notre pays. J’ai confié cette mission à la 1ère D.F.L. Demain vous allez attaquer, Bonne Chance.

Pourquoi cette prestigieuse 1ere D.F.L. va-t4elle s’engager dans un tel combat, mal équipée, alors que son aventure prestigieuse la destinait à investir l’Allemagne.

Les cadres de la division sont amers et accusent le général De Lattre de Tassigny de s’être débarrassé d’eux à bon compte tout comme la 2ème DB envoyée soumettre la poche de Royan. Le fringant général leur reprochait d’être d’origine F.F.L.
 Cela dit le 10 avril les Français passent à l’offensive. Il est quatre heures du matin, nos soldats sont en tenue allégée, musette contenant un chandail, leurs munitions, les boîtes de ration « K ». Le pire de tout ce sont les chaussures à semelles de caoutchouc lisse inadaptées à la montagne.

Vont suivre jusqu’au 26 avril une succession de combats souvent meurtriers où nos marins vont se distinguer. A l’initiative du capitaine de corvette Roger Barberot nous avons déployé dans cette « montagne à vaches » de petits chars américains « Stuart » dont l’efficacité ne sera pas à démontrer.

Malheureusement pour nous après tant de sacrifices, le 29 avril la route de Turin nous était fermée par les alliés qui eux entrèrent en vainqueur dans la capitale du Piémont. La D.F.L. ne quitta pas la France. Quant à Tende et la Brigue dont la population plébiscitait un rattachement à la France elle dut encore attendre deux ans.

Concernant nos marins, un monument a été érigé par la F.A.M.M.A.C en 1962 sur la commune de Breil-sur-Roya.

La chronique historique « signée Donec » : Avoir la baraka

En 1962 la blessure que furent pour le peuple Pied-noir les « accords d’Evian » n’est pas prête de se refermer et certaines figures fanatiques ne vont pas manquer de le faire savoir au général de Gaulle sans prendre de gants.

A l’été 1962 le mal est fait et les dés jetés. Le général qui regardait loin au-dessus des têtes est tout à l’idée de propulser notre pays dans son rêve de grandeur, de la « force de frappe » à la construction de l’Europe. Pourtant tapis dans l’ombre et armés jusqu’aux dents, les nostalgiques de l’Empire guettaient. Ils reprochaient au général l’oubli de ses promesses et son « je vous ai compris ! »

Le colonel Jean Bastien-Thiry, homme brillant et scientifique de haut niveau avait une passion pour l’Algérie, son potentiel et la folie que représentait pour lui cet abandon. En cet été 1962 l’homme qui personnifie cette tragédie c’est Charles De Gaulle. Il doit payer le prix de ce renoncement.

Jean Bastien-Thiry sera la main de Dieu et elle frappera le 22 août 1962.

L’attentat est remarquablement organisé avec, cerise sur le gâteau une « taupe » à l’Elysée qui renseigne « les argousins d’Argoud » comme l’écrira le Canard Enchainé, sur les allées et venues du chef de l’Etat. Pourtant dans la réalisation des grains de sables viendront perturber son déroulement. Ce seront des signaux que la tombée du jour empêche d’apercevoir, des hommes qui se dégourdissent les jambes et retardent l’action. Sans oublier la chance insolente du général qui passe à travers les balles. Les victimes sont aussi servies par la conception de la DS Citroën qui avec deux pneus crevés conserve, imperturbable, sa trajectoire. A cet instant le général a dû se croire immortel.

De tous les protagonistes de l’affaire, seul le cerveau, le colonel Jean Bastien-Thiry sera passé par les armes devenant ipso facto le martyr de la cause auquel sa « famille » vouera un culte éternel.

Les années ont passées et aujourd’hui nos chères têtes blondes ne connaissent plus, à l’instar des élèves du lycée Papillon cher à Ray Ventura, ni De Gaulle, ni Vercingétorix, ni Napoléon pas plus que l’Algérie, L’Indochine et quelques autres contrées ingrates.

La chronique historique « signée Donec » : Ah ces britaniques !

Nous, marins, avons une faiblesse pour les Britanniques, pas les garçons bien sûr qui nous ont étrillés régulièrement au cours des siècles mais pour leurs épouses qui profitent de ce que les maris ont le dos tourné pour nous réserver le meilleur accueil qui soit. Nous avons en mémoire la terrible et fourbe affaire de Mers el Kébir où le petit père Churchill profitant d’un amiral français pusillanime nous réduisit à l’impuissance.

Il remit ça avec les Italiens à Tarente. Les Anglais lançaient leurs torpilles à partir de biplans antédiluviens : les Feray Swordfish. Le courage des pilotes britanniques défiait l’imagination. Les officiers de sa Gracieuse Majesté n’en restèrent pas là et décidèrent un nouveau bombardement  sur Gênes où les Français s’étaient déjà fait la main. Ce sera l’opération « Grog » » le 8 février 1941.

Il reste de ce moment d’Histoire un obus que chacun peut découvrir dans la cathédrale. Comment est-il arrivé là, alors que les cibles étaient dans le port ? Je dois l’anecdote à l’ami Jon. Je le laisse évoquer l’événement.

« L’accident commence quand l’officier qui devait effectuer les calculs balistiques depuis la tour du directeur de tir du cuirassé HMS MALAYA s’est senti mal. Il a été remplacé illico par un jeune midshipman qui n’avait jamais touché les instruments auparavant, Henry Atfield. Il ignorait que les calculs devaient se faire à l’envers. Donc il a donné un ordre de pointage erroné mais par coup de chance l’obus n’a pas explosé. Henry de protestant qu’il était s’est dès le lendemain converti au catholicisme ».

Après la guerre il devint le responsable du « SHOM » britannique.

Disparu à 88 ans, il aura effectué toute sa vie durant des pèlerinages à la cathédrale San Lorenzo de Gênes.

La chronique historique « signée Donec » : Les filles prennent le pouvoir

Il y a quelques jours avait lieu la « journée du marin » dont l’objectif avoué est de susciter des vocations. Naturellement à cette occasion les préparations militaires marines ont le vent en poupe et sont à l’honneur. L’évènement avait lieu à Cannes où une goélette avait été affrétée. Un de mes amis a envoyé une photo des stagiaires prise sur le grand voilier. On voit trois pov’ matelots, entourés d’un escadron de huit » matelotes » conquérantes, preuve s’il en était que le pouvoir est en train de changer de main.

Il n’en a pas toujours été ainsi vers 1914 les filles étaient reléguées à des postes subalternes et sans avenir. Pour lever la tête hors de l’eau elles devaient être d’une trempe exceptionnelle à l’image de Nicole Girard-Mangin, médecin, maîtresse-femme et …suffragette.

D’origine meusiennne, Nicole MANGIN naît à Paris en 1878. A 18 ans elle entame des études de médecine et se marie deux ans plus tard avec André Girard négociant en vin fortuné. Elle travaille d’abord avec son mari mais en 1903, lasse de compter les bouteilles revient à la médecine.  Elle présente sa thèse sur les poisons cancéreux en 1906. En 1914 la voilà au dispensaire de Beaujon.

Quand la guerre éclate, elle ne barguigne pas avec le patriotisme et s’engage. L’armée qui pense avoir affaire à Gérard MANGIN l’envoie comme médecin-auxiliaire à l’hôpital de Bourbonne-les-Bains. Bien en peine de se trouver un uniforme, elle en confectionne un en s’inspirant des femmes médecins britanniques.

Voulant se rapprocher de l’action, elle permute avec un confrère et s’installe à Reims. Elle accomplit son sacerdoce avec rigueur, fermeté et une infinie compassion. Pourtant au début de l’année 1916 mutée à Vacherauville dans un hôpital de campagne à quelques kilomètres de Verdun rien ne lui sera épargné. Femme, on lui interdit l’accès de l’hôpital. Mais son autorité, son charisme, sa compétence ne se discutent pas. Elle se rend indispensable.

Le 21 février 1916, désemparée, elle assiste à la déroute française. Le 25 février l’évacuation est ordonnée, il reste 9 blessés intransportables, elle décide de rester avec eux. Pendant deux nuits, elle connaît l’angoisse avant de ramener quatre des plus atteints à Clermont-en-Argonne, avec son chauffeur. Au cours du détour par Sivry-la-Perche, elle est légèrement touchée par un fragment de mica. Elle parvient à déposer ses patients à Froidos et repart à Bar-le-Duc où sont encore les cinq autres, en pleine zone de combat. Pour ce fait d’armes, elle est promue médecin-major en 1916.

On lui confie alors la direction de l’hôpital-école Edith Cavell à Paris où sont formées les infirmières auxiliaires.

Après la guerre, la terrible épidémie de grippe espagnole se déclare faisant des victimes par milliers. Nicole Girard-Mangin est à nouveau à la manœuvre ferraillant avec l’administration pour donner le meilleur à ses malades.

Elle disparaît il y a juste un siècle, le 6 juin 1919 pour avoir absorbé une trop forte dose de médicaments dans des circonstances qui restent troubles.